Saint FARON, évêque de Meaux (672)

  Fête : 28 octobre

Faron s'appelait primitivement Burgundofaro, et sainte Fare, sa sœur, Burgundofara, c'est-à-dire le Bourguignon, la Bourguignonne. Faro, fara, signifie race, lignée, dans la langue bourguignonne. Notre saint était donc d'une noble race bourguignonne. Il eut pour père Agneric, et pour mère Léodegonde, femme d'une insigne vertu. Son frère fut saint Chagnoald, évêque de Laon ; et sa sœur, la glorieuse sainte Fare, qui, par l'éclat de ses miracles et par l'établissement d'un célèbre monastère dont elle était abbesse, a rendu sa mémoire immortelle. Il fut élevé à la cour de Théodebert II, roi d'Austrasie, dont Agneric était un des premiers conseillers, et il y donna dès sa jeunesse de si belles preuves de prudence et de valeur, qu'il se fit chérir de son prince et des autres monarques qui partageaient alors le grand royaume de France.

Après la mort funeste de Théodebert et de Thierry, son frère, Faron vint à la cour de Clotaire II (613) ; par sa bonne conduite, il s'acquit tant de réputation et de crédit, qu'il fit partie du conseil du roi. Il fuyait le faste et la vanité, et avait horreur des délices ; l'amour des biens célestes lui faisait mépriser ceux de la terre, et, dans la liberté que son prince lui donnait, il l'exhortait souvent a ne point attacher son cœur au faux éclat de sa dignité, mais à porter continuellement sa vue sur le royaume éternel. En toutes ses actions, il ne cherchait qu'à procurer la gloire de Dieu et à se rendre plus agréable à sa divine Majesté, et, bien qu'il se fût engagé dans le mariage en épousant Blidehilde, femme d'une sagesse consommée, il portait toujours dans son cœur le désir de renoncer au monde pour se consacrer entièrement à son service. On remarque aussi qu'il soutint toujours les droits de la monarchie et qu'il n'épargna rien pour la conserver dans sa splendeur. Il se servait de son pouvoir pour délivrer les opprimés et pour secourir les malheureux. Ses conseils étaient toujours équitables ; mais ils penchaient plus du côté de la miséricorde que de celui de la rigueur.

Des ambassadeurs saxons ayant manqué de respect à Clotaire, celui-ci les fit mettre en prison et jura de laver dans leur sang l'injure qu'il avait reçue d'eux. Faron obtint de lui qu'il différât de vingt-quatre heures l'exécution de la sentence. Ce terme expiré, le roi leur pardonna et les renvoya même chez eux comblés de présents.

Quoiqu'il fit un saint usage du crédit que ses vertus et ses talents lui donnaient à la cour, qu'il y menât une vie édifiante et conforme aux maximes de l'Evangile, il n'en était pas moins effrayé des dangers auxquels on est exposé dans le monde, et il s'affligeait intérieurement de l'impossibilité où il était de servir Dieu sans distraction. Enfin, à la suite d'un entretien qu'il avait eu sur ce sujet avec sainte Fare, sa sœur, il résolut de ne plus différer l'exécution du dessein qu'il méditait depuis longtemps, de renoncer au commerce des hommes. Il trouva Blidehilde, sa femme, dans les mêmes dispositions, et ils se séparèrent d'un mutuel consentement. Blidehilde prit le voile et choisit pour demeure un lieu solitaire dans une de ses terres, qu'on croit être Champigny. Elle y mourut quelques années après en odeur de sainteté. Quant à saint Faron, il entra dans le clergé de Meaux dont il devint l'ornement.

Sa réputation croissant de jour en jour, il fut élu évêque de Meaux en 627 après la mort de Gondoald. Il remplit aussitôt ce siège de l'éclat de ses vertus, et il entreprit avec tant de courage la conduite des fidèles dont la sagesse divine l'avait fait le pasteur, qu'il les détourna des vices où ils étaient engagés et les fit entrer dans les sentiers de la vertu. Plusieurs grands personnages, touchés de l'éminence de sa sainteté, vinrent chercher sous ses auspices les moyens de servir Dieu avec plus de perfection ; entre autres saint Chilain, saint Fiacre et saint Agile. II consacra le premier évêque apostolique, et les deux autres furent d'excellents abbés dans son diocèse. Il fit aussi des miracles très éclatants il rétablit par le signe de la croix une pierre d'autel qui s'était rompue en deux et un verre qui s'était cassé ; il rendit la vue à un aveugle par la vertu du saint Chrême dont il l'oignit en le confirmant ; il ouvrit par sa seule parole la porte d'une prison et en fit sortir des prisonniers qui promettaient de se convertir : il retira de l'eau, saines et sauves, des personnes qui y avaient déjà demeuré enfoncées pendant une heure. Enfin, comme il ne refusait rien à Dieu de ce qu'il pouvait faire pour sa gloire, Dieu accomplissait aussi tous ses désirs.

Il est rapporté dans sa vie que le démon, qui veille sans cesse à la perte des justes, l'attaqua un jour par le souvenir de Blidehilde, son épouse. Il désira la revoir : il l'y invita à trois reprises différentes. Cette vertueuse femme vint ; mais, pour ne pas exposer le serviteur de Dieu ni elle-même aux embûches de Satan, elle se fit couper les cheveux, prit de mauvais habits, se revêtit d'un cilice et se présenta ainsi à lui. Cela le fit rentrer en lui-même et faire réflexion sur son oubli. Il eut honte de sa faiblesse, il s'en humilia devant Dieu, puis, admirant la prudence et la vertu de son ancienne épouse, il la renvoya.

Son mérite extraordinaire le rendit vénérable à tous les prélats de son temps. En 630, il fit avec saint Amand la dédicace de l'église abbatiale de Rebais, en présence de saint Ouen, qui en était fondateur, et de saint Eloi ; ce fut là qu'il rétablit avec eux ce petit autel de marbre qui s'était fendu en deux. En 647, il assista avec les mêmes saint Ouen et saint Eloi, déjà consacrés évêques, à la translation des reliques de saint Crépin et de saint Crépinien à Soissons. En 657, il se trouva au synode de Sens, où près de quarante évêques accordèrent un privilège considérable au monastère de Saint-Pierre-le-Vif. En 662, il souscrivit à un autre privilège que Berteford, évêque d'Amiens, donna à l'abbaye de Corbie. Quelques auteurs prétendent qu'avant son épiscopat il avait été religieux des Ordres de Saint-Benoît ou de Saint-Colomban, comme saint Cagnoald, son frère ; mais il est plus véritable qu'il n'en a été que le bienfaiteur, et c'est en cette qualité qu'il a été inséré dans le martyrologe monastique.

Dès l'année 628, voulant avoir auprès de lui des religieux dont l'exemple l'animât à la vertu et avec lesquels il pût s'entretenir des choses célestes, il fonda, au faubourg de Meaux, sur les terres de son patrimoine, et dota de grands revenus un magnifique monastère en l'honneur de la sainte Croix, de saint Jean-Baptiste et des apôtres.

Ce saint évêque mourut le 28 octobre 672, à l'âge d'environ quatre-vingts ans ; la cathédrale de Meaux possède une partie de ses reliques. On le représente guérissant un jeune homme aveugle.


Sources :

« Saint Faron, évêque de Meaux », dans Paul Guérin, Les Petits Bollandistes : du 28 octobre au 30 novembre, t. XIII, Paris, Bloud et Barral, 1876, p.7 (en ligne : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k30743s/f13.item)